L’éducation inclusive : des violences aux diversités culturelles

Magdalena Kohout-Diaz présentera son Habilitation à Diriger des Recherches en Sciences de l’éducation sous l’intitulé : L’éducation inclusive : des violences aux diversités culturelles.

La soutenance se tiendra le lundi 22 mai 2017 à 14h en Salle du Conseil (Université de Bordeaux, site de la Victoire 3ter Place de la Victoire, 33000 Bordeaux). Le jury est composé de : Pr. D. Berger, Pr. E. Debarbieux, Pr. M. Grollier, Pr. R. Malet (garant), Pr. S. Štech

Résumé :

« Le travail présente un parcours de recherches original, qui conduit de l’analyse des violences en milieu scolaire dans un contexte post-totalitaire à l’étude des voies d’une éducation inclusive à l’égard des diversités culturelles. L’auteure en montre les principaux points de tension (totalitarisme/citoyenneté ; savoirs/incertitudes ; violences/diversités ; histoire/réel ; normal/pathologique ; compensation/cultures ; besoin/désir/demande ; global/local) articulés autour d’un axe central, celui de l’exclusion/inclusion.

C’est l’effort sans cesse renouvelé pour réaliser une élucidation la plus claire possible de ses propres motifs et de son parcours qui permet à chaque chercheur d’assumer la singularité d’un modèle théorique et c’est avec détermination que la philosophie, les sciences de l’éducation, la sociologie ou la psychanalyse sont ici interrogées.

Les analyses conduisent à l’émergence d’un objet de recherches nouveau et polymorphe : l’éducation inclusive. Ce thème de recherches est certes l’un des éléments majeurs du questionnement subjectif du chercheur mais aussi et surtout il s’inscrit pleinement dans une demande sociale croissante, comme en témoignent régulièrement les travaux  l’UNESCO entre 1990 et 2017, soulignant le droit de tous à une éducation de qualité pour en finir avec toute forme de discrimination et favoriser la cohésion sociale. L’éducation inclusive ne se réduit pas à l’inclusion, ni à l’école inclusive, c’est un processus d’ouverture à la diversité excédant largement la sphère scolaire et concernant d’autres secteurs de la vie publique (santé, politique, justice…). Elle ne se décrète pas mais elle est à l’œuvre déjà dans les représentations et les gestes concrets des acteurs qui en esquissent les contours.

Cependant, il est nécessaire de prendre la juste mesure des modèles herméneutiques dominants, de leurs vulgarisations, de leurs simplismes et de leur extension. Quelques-uns d’entre eux sont évoqués comme autant de questions et d’enjeux de recherche : l’épidémie de harcèlement (objet d’un véritable marketing scolaire ?), la décadence des mœurs éducatives (liée à la néo-libéralisation éducative?), le déclin de l’autorité (liée au passé totalitaire ?), la naturalisation de l’intelligence (sélection des classes dominantes ; reproduction ?), la médicalisation des difficultés (exclusion des précaires ?) ou l’errance diagnostique et nosographique (interpénétration des marchés scolaires et ceux de la santé).

Il s’agit donc d’ouvrir résolument un champ de travail vaste, celui des recherches comparées sur l’éducation inclusive au moment où paraissent en France les textes organisant le Certificat d’Aptitude Professionnelle aux Pratiques de l‘Éducation Inclusive. Au-delà, trois grands objectifs scientifiques s’esquissent : persévérer à montrer le rôle déterminant de l’esprit critique et de la liberté de parole singulière dans l’amélioration du climat scolaire et dans la construction d’une citoyenneté démocratique active par l’éducation, tant du côté des élèves (dont il faut reconsidérer la parole, souvent ravalée à un bavardage) qui celui des enseignants (véritables interprètes de la diversité culturelle) ; comparer les paradoxes, les obstacles et les points d’appui des politiques publiques inclusives, dans leur déploiement dialectique entre le global et le local ; analyser les nouveaux mécanismes de discrimination, masqués par des approches biomédicales vulgarisées de l’éducation afin de les déconstruire.

Pour ce faire, le travail de synthèse donne à voir qu’une variété d’approches méthodologiques (quantitative, qualitative, clinique, d’intervention et/ou ethnographique) est requise, à chaque fois adaptées à l’objet scientifique et aux intentions du chercheur. Un fil rouge peut toutefois être repéré, qui identifie la saisie du sujet divisé par lui-même à la fois comme visée finale et comme point d’achoppement des recherches.

Le travail s’ouvre sur trois directions de travail, elles-mêmes riches de nombreuses perspectives : les approches comparatives du climat et des violences scolaires (Europe centrale et Balkanique : éducations et post totalitarismes ; effets des politiques publiques européennes de prévention : marketing éducatif et élèves en difficulté ; effets de segmentation liés au marché des besoins éducatifs particuliers) ; l’inclusion scolaire et la santé mentale à l’école (confusion des catégorisations, dans et hors de l’école ; approches comparées : mise en évidence des mécanismes globaux/locaux et effets paradoxalement discriminants des dispositifs/des politiques publiques de soutien ; conséquences sur les représentations des enseignants) et enfin l’éducation inclusive et l’évolution des professionnalités éducatives (approches comparées des nouveaux métiers de l’éducation inclusive ; l’enseignant inclusif comme interprète de la diversité ; la formation à l’éducation inclusive à/par la recherche professionnelle, l’analyse des pratiques et le renouveau de la casuistique qui revalorise la créativité de métiers éducatifs . invisibilisés). »